Not Waving but drowning de Devyn Waitt (2012)

Deux post-adolescentes (Adele et Sara) veulent quitter leur petite ville natale de Floride pour aller s’épanouir à New York. Mais l’une d’elle (Sara) va devoir rester au bercail pour des raisons familiales tandis que l’autre (Adele) part seule tenter sa chance. Le récit s’organise en alternance entre le parcours des deux jeunes filles. Tel est le point de départ de ce premier film de Devyn Waitt joliment titré Not Waving but Drowning (que l’on pourrait traduire par Pas d’ondoiement mais la noyade). En effet, alors qu’au début les deux amis se promettent de faire de leur été celui de la révolution, on va plutôt les suivre dans leurs galères pour trouver leur place dans le monde.

Cela prend la forme du récit d’apprentissage. Parallèlement à l’une qui débarque à New-York, nous suivons l’autre qui passe son été à travailler dans une petite maison de retraite. Là où la première amorce une course en avant vers la jeunesse et la fraîcheur d’une vie anonyme dans une mégalopole, la seconde se confronte à l’expérience et aux âges avancés des résidents dans sa petite bourgade.

Le film est plutôt admirable dans la manière qu’il a de ne pas être présomptueux, de ne pas sombrer dans la success story facile et attendue. Adele arrive à New-York avec le rêve de devenir journaliste, mais elle doit d’abord régler des problèmes concrets de logements, de travail, d’adaptation à la ville, du peu de confiance qu’on peut faire aux gens… On ne tombe pas dans un schéma archétypal de la rencontre impromptue et où soudain tous les rêves se réalisent. Au contraire la réalisatrice nous montre bien les étapes difficiles mais nécessaires à passer pour parvenir à devenir quelqu’un dans une ville comme New-York. De l’autre côté, Sara, dans sa maison de retraite a un parcours paradoxalement plus caricatural. Elle y rencontre une formidable vieille dame fumeuse de marijuana qui va devenir son amie et sa confidente. Le film est fortement déséquilibré par cette narration à deux voix qui ne fonctionne jamais totalement, les deux parcours ayant un peu du mal à se refléter et se répondre. Il y a cette légère dichotomie de ton entre une partie très indépendante, pas très originale mais rafraîchissante (New-York) et une autre beaucoup plus conventionnelle et apparaissant clairement plus faible (Sara qui travaille à la maison de retraite).

La mise en scène est au diapason, la partie Adele étant plus inventive et remarquable que la partie Sara. On doit sans doute cela au fait que la ville de New-York est naturellement cinégénique, mais c’est également dû au fait qu’il s’y passe plus de choses, que le récit est plus intense, ce que la mise-en-scène le reflète. Le style n’est pas sans évoquer celui de Sofia Coppola. On retrouve des plans quasiment similaires (notamment de Virgin Suicides) de jeunes filles dans des champs au lever du soleil caressant les épis de blé, ou de mains qui volent par la fenêtre d’une voiture qui roule. Ces espèces de petites touches impressionnistes devenues aujourd’hui des figures de style labellisées « publicité pour parfum », ne sont pas désagréables mais, à l’image général du film, manquent un peu de personnalité. Néanmoins, la jeune réalisatrice tente des choses et parvient à s’extraire d’un style télévisuel qui pourtant la guettait à de nombreuses reprises.

C’est aussi du côté de part son casting que la personnalité du film va s’affirmer. Les deux jeunes actrices principales (Vanessa Ray et Megan Guinan) sont formidables, pétillantes et fraîches tout en laissant apparaître leurs fêlures. Autour d’elle on retrouve Adam Driver, acteur encore méconnu mais qui perce actuellement dans une des séries phare de HBO cette année, Girls de Lena Dunham et produite par Judd Appatow, laquelle est finalement très proche du film. Les deux suivent un groupe de filles essayant de faire leur trou à New York partage ce même ton indépendant et réaliste loin de ce dont Hollywood nous a habitués.

Un joli petit film donc, très imparfait mais qui a une certaine fraîcheur, une authenticité indéniable,  qui au final se regarde très agréablement et au point de nous faire oublier à quel point il est inconséquent.

Grégory Audermatte

Not Waving but drowning ***1/2

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Un commentaire sur “Not Waving but drowning de Devyn Waitt (2012)”

  1. David T dit :

    J’ai été bien moins sensible que toi à l’esthétique éculée et clipesque du film. J’ai trouvé cela insupportable de naïveté. Et c’est vraiment dommage car il y avait vraiment quelque chose à faire de cette histoire, mais la forme m’a gâché le film.

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