Le Projet Nim (Project Nim) de James Marsh (2011)

Réalisé par James Marsh, documentariste oscarisé pour Le Funambule en 2008, Le Projet Nim suscite un véritable intérêt par son histoire, par la trajectoire de Nim telle qu’elle est racontée, plutôt que par sa construction, très classique et digne d’un modeste mais bon documentaire télé pour meubler les après-midi d’une chaîne comme France 5 (le film a d’ailleurs été produit par HBO et la BBC). Les protagonistes se succèdent et racontent à tour de rôle leurs souvenirs et leurs rapports avec Nim. Le dispositif de mise en scène n’est pas très intéressant en soi, mais le sujet est lui autrement plus intriguant, sinon passionnant.

Nim est un chimpanzé particulier, choisi dans les années 70 pour participer à une expérience sur le langage. Placé dans une famille de scientifique, il est élevé dès son plus jeune âge dans ce contexte singulier et comme un enfant. Le but est d’instaurer une communication avec le singe via le langage des signes. Nim apprend et une communication semble s’établir…

Le documentaire se déroule en trois temps, celui de l’expérience proprement dite, celui du placement de Nim dans un laboratoire de recherche, puis celui de la « retraite ».

L’expérience se solde par un échec. Nim n’apprend pas à communiquer par les signes mais il les assimile. Il y a ainsi illusion car Nim semble communiquer mais est en fait incapable de formuler du sens à partir des signes qu’il a intégré. Les scientifiques renoncent a leur utopie, comprennent qu’il est impossible d’établir ce lien direct entre deux espèces différentes par le langage. Nim grandit et, adulte, devient trop fort, trop ingérable. Il est devenu un membre à part entière de la famille mais il ne peut plus vivre avec elle.

L’histoire de Nim qui nous est racontée par les différents protagonistes se déroule sur une période de 26 ans. Le parcours de Nim évoque immanquablement La Planète des singes : les origines, à tel point que l’on peut se demander si les scénaristes n’ont pas pris Nim comme modèle pour le personnage de César dans le film de Rupert Wyatt !

Comme César, Nim grandit dans une famille jusqu’à ce qu’il soit placé en cage, un endroit où il est malheureux. Pour des raisons économiques, le centre de recherche d’où provient Nim est racheté par un laboratoire de recherche qui utilise les singes comme cobayes pour leurs expériences. Nim est cependant un singe à part, du fait qu’il a apprit le langage des signes, et il est quelque peu favoriser pour cette raison. Ses parents adoptifs ne l’oublient pas et veillent toujours  sur la façon dont il est traité.  On reste très proche du scénario du blockbuster de Rupert Wyatt et la relation entre le personnage joué par James Franco et César. C’en est stupéfiant.

La relation entre les parents adoptifs et Nim est à ce point forte qu’ils vont se battre toujours pour le bien du chimpanzé. Il fait partie de leur famille, il est devenu leur enfant, et cherchent légitimement à le protéger. Nim est un primate particulièrement attachant. Tout le récit est alimenté par des images d’archives, vidéos et photos, qui permettent de prendre la mesure de la personnalité de Nim, de son caractère et de ses émotions très sensibles. L’ambition scientifique de briser la barrière du langage entre l’espèce animale et l’homme pose d’innombrables questions qui renvoient à proximité de l’humain avec l’animal.

Nim passera la suite de sa vie dans un ranch où il est maintenu en captivité mais bien traité, jouissant d’une retraite a priori paisible. Il y a quelques jours, on nous annonçait la mort d’un chimpanzé ayant été utilisé pour le rôle de Cheetah dans la série des Tarzan avec Johnny Weissmuller, et c’est à Cheetah que l’on pense alors maintenant. Ils sont deux singes exceptionnels, aux parcours atypiques, et qui finissent leur vie en marge et dans le confort d’une retraite bien méritée. Le projet Nim constitue in fine un portrait très touchant de ce singe auquel le spectateur aussi s’attache, au delà des considérations éthiques et morales qui peuvent se poser également.

Benoît Thevenin

Le Projet Nim ***1/2

Sortie française le 11 janvier 2012

Lire aussi :

  1. Shadow dancer de James Marsh (2012)
  2. Le Funambule (Man on wire) de James Marsh (2008)
  3. The Red Riding Trilogy par Julian Jarrold, James Marsh et Anand Tucker (2009)
  4. Un Garçon fragile – Le Projet Frankenstein (Szelid teremtes – A Frankenstein Terv) de Kornél Mundruczó (2010)
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