The Housemaid de Im Sang-soo (2010)

L’idée qu’un remake puisse obtenir la Palme d’Or est assez saugrenue non ? Le nouveau film de Im Sangsoo s’inspire d’un chef d’oeuvre du cinéma coréen, une fable sociale, sombre et cruelle, tout ce à quoi la version nouvelle ne ressemble pas. Im Sang-soo reprend l’idée de départ mais ne poursuit pas la même finalité. Son film est construit différemment, adopte un point de vue quasi inverse, et ne dépoussière en rien le film original. Cette servante là est fragile et jamais manipulatrice ou inquiétante. Le cinéaste passe du conte social à un drame intime, classieux mais ampoulé, qui raconte finalement peu de choses de la société coréenne actuelle.

Im Sang-soo, incontestablement, sait filmer. Les images sont toutes très belles, sophistiquées, mais le style est simplement poseur. Le cinéaste distille un faux trouble, un érotisme soft mais ne dérive jamais vers ce qui faisait la substance et l’intensité du film de Kim Ki-young : une confrontation psychologique autrement plus marquante et sombre, qui n’inspirait aucun espoir. Dans le film de Im Sangsoo, c’est tout l’inverse.

On ne va pas se plaindre de ne pas avoir au même film, rassurez-vous. Sauf que la ré-interprétation de l’histoire par Im Sangsoo ne convainc pas. Le cinéaste reprend quelques éléments de l’intrigue originale, qu’il n’explique pas nécessairement d’ailleurs, mais les détourne dans un but différent, quitte à mettre les deux pieds dans le plat du grotesque. Le plus dommageable, c’est cette conclusion étonnante et même ridicule, qui achève de nous convaincre du peu de finesse d’Im Sang-soo, quand bien même son aîné Kim Ki-young n’est déjà pas le cinéaste le plus subtil du monde.

Reste que cette version de The Housemaid n’est pas déplaisante à voir. Le rythme narratif est bien tenu et, comme le film de Kim Ki-young n’est pas nécessairement connu de tous, le remake peut surprendre agréablement. Il aura aussi vite fait d’être agaçant, du fait de quelques facilités et grossièretés. Le personnage du mari, au charisme assez nul, est peu présent à l’écran et toujours risible. On a presque affaire à un film de femmes, dans lequel les diverses figures féminines s’affrontent de façon plus ou moins mesquine, en tout cas pas innocente.

Au final, Im San-gsoo livre un film qui ne soutient d’aucune manière la comparaison avec son modèle. Le résultat n’est en fait pas mauvais, pas très bon non plus. C’aurait pu être un remake intéressant, plus en phase avec son époque, mais ce n’est en fait qu’un film médiocre de plus, certes brillant dans la forme, mais trop souvent grotesque pour le fond.

Benoît Thevenin


The Housemaid – Note pour ce film :

Sortie française le 15 septembre 2010


Lire aussi :

  1. Ha Ha Ha de Hong Sang-soo (2010)
  2. L’Ivresse de l’argent de Im Sang-soo (2012)
  3. Les Femmes de mes amis (Jal Aljido Motamyunseo) de Hong Sang-soo (2009)
  4. Matins calmes à Séoul (The Day he arrives/Book chon bang hyang) de Hong Sang-soo (2011)
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Aucun commentaire sur “The Housemaid de Im Sang-soo (2010)”

  1. MaGaLi dit :

    ce que j’ai pu en voir ou en lire, me dit que ça a l’air assez chiant comme film … cette esthétique à la noix, doit être rapidemnt saoulante

    enfin affaire de goût

  2. Foxart dit :

    La bande annonce donne le sentiment d’un film chichiteux à souhait…
    Ta critique tiède ne me donne guère envie d’aller y voir de plus près…

  3. Knorc dit :

    Je te trouve un peu dur. J’ai beaucoup apprecié ce film. Peut-etre est-ce parce que je n’ai pas vue l’oeuvre originale ? En tout cas c’etait quand meme au dessus du niveau de beaucoup des autres films que j’ai pu voir. Ca ne vaut surement pas une palme d’or, certes, mais c’est loin d’etre un film « chiant ». Parce que des vrais fulms chiants j’en ai vus…

  4. Fablin dit :

    Ah, voila, très bien tout ça. Ca aurait été presque indécent qu’Im Sang-soo ait des chances de palmes avec un remake. et Jeong Do-yeon a déjà eu son prix d’interprétation, alors bon.

    Et de toute façon, entre les deux Coréens, c’est Lee Chang-dong qui mériterait vraiment un prix. Je n’ai jamais été déçu par un de ses films, et les premiers échos sur Poetry annoncent quelque chose de grand.

  5. Benoît Thevenin dit :

    Je confirme pour « poetry ». Pour moi, surtout vu la sélection, c’est une palmecrn puissance. J’ai écrit dessus, je publie mon texte des que je trouve une connexion pour 😉

  6. Je suis d’accord qu’il s’agit d’un film de femmes, par contre j’ai vu bien plus ennuyeux comme films… Le film a retenu mon attention et les acteurs étaient bons. Par contre je n’ai pas vu l’original. Si je l’avais vu je pense qu’il y aurait plus de chance que je sois déçue…En plus vu que je faisais l’interprétation d’une autre première j’ai raté la toute fin donc j’ai d’autant plus une impression de grand suspense…!

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