In the air (Up in the air) de Jason Reitman (2010)

Coqueluche du cinéma indépendant US grâce à Juno, Jason Reitman applique avec In The air la même recette qui a jusqu’à présent fait son succès. C’est aussi une recette qui fait passer le cinéaste pour un monstre d’hypocrisie, ce que In the air n’arrange donc pas.

La crise économique fait vaciller l’empire américain, réduit à néant les vies fragiles de millions de citoyens honnêtes. Celui que l’on sollicite pour dégraisser les effectifs des entreprises, c’est lui, Ryan Bingham (George Clooney), fossoyeur professionnel chargé du sale boulot et qui trouve son plaisir dans les incessants voyages en avion que sa fonction l’oblige à emprunter pour aller d’une ville à l’autre (la superficie des Etats-Unis équivaut à 17 fois la France, rappelons-le). Ryan est heureux de la vie qu’il mène. Il est un solitaire cynique qui trouve refuge dans les airs, exerce son charme auprès des jolies femmes qu’il rencontre (par exemple Vera Farmiga), et se contente très bien de cette vie. Son seul but est de collectionner les avantages que lui procure ses multiples cartes d’abonnés, et de réussir à cumuler un total de miles parcourus dans le ciel équivalant à la distance Terre-Lune.

Ryan Bingham est très exactement le type de personne qu’est déjà Nick Taylor (Aaron Eckhart), le personnage principal du premier film de Reitman, Thank you for smoking. Chacun procède de la même manière, se comporte en séducteur, promène un sourire à faire tomber les jolis-coeurs, et promeut un discours parfaitement rodé pour défendre l’indéfendable. Nick Taylor remercie les fumeur d’engraisser l’industrie du Tabac, Ryan Bingham remercie les travailleurs d’avoir sacrifier leurs vies pour le grand capital.

Arrive le moment ou Ryan est lui-même victime d’un plan de restructuration visant sa propre entreprise. Son idéal de vie est menacé et le voila qui s’attache à démontrer que son job est important. Il doit convaincre une jeune diplômée (Anna Kendrick) de l’efficience de son travail et des limites qu’imposent le nouveau modèle dicté par la jeune femme, économiquement rentable mais éthiquement (un peu plus) abominable.

Le film fonctionne parfaitement dans sa première partie, l’insolence de Ryan payant plutôt bien. On s’amuse des réparties cinglantes qui s’enchaînent, personne n’est épargné même si certains moins que d’autres.

Le problème c’est que Jason Reitman prouve encore quel immense faux-cul il est lui-même. Dans chacun de ses films il commence par rentrer dans le lard, propose une satire grinçante et appréciable des moeurs de la société américaine. Reitman éreinte le capitalisme sauvage à travers Thank you for smoking et In The air, de la même manière qu’il casse un peu l’image idéale de la famille traditionnelle américaine dans Juno.

Sauf qu’il ne faut pas s’arrêter aux débuts de ces films. Jason Reitman nous fait le coup à chaque fois, n’assume pas son cynisme et finit par tout jeter à l’eau au prix d’un retour moral très bien-pensant. Juno, si déterminée à se débarrasser de l’enfant qui grossit son ventre, finit par s’imaginer en bonne mère aimante. Rebelote dans In the air. Ryan remballe son cynisme, atteint ses limites et va devenir un citoyen honnête comme les autres. Le retour moral gâche tout et Jason Reitman ferait bien se rendre compte que ça commence à devenir insupportable.

Benoît Thevenin


In the air – Note pour ce film :
Sortie française le 27 janvier 2010

Lire aussi :

  1. Young Adult de Jason Reitman (2012)
  2. Sex Friends (No strings attached) d’Ivan Reitman
  3. Robin des bois (Robin Hood) de Ridley Scott (2010)
  4. Harragas de Merzak Allouache (2010)
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Aucun commentaire sur “In the air (Up in the air) de Jason Reitman (2010)”

  1. Denis Leborgne dit :

    C’était en effet un film bien sympathique, mais comme tu le dis si bien, si les concepts que Reitman introduit dans ses films étaient assumés jusqu’au bout, ils seraient probablement beaucoup plus intéressants (ses films, pas les concepts). Personnellement, c’est surtout la manière dont il ramène ses personnages à la norme qui me dérange (car extrêmement prévisible pour un spectateur averti car très banale). Un peu plus d’audace et moins de conformisme, Mr Reitman.

  2. Cyrmen dit :

    Tout à fait d’accord avec ce que tu as écrit (comme pour Mr Fox)

  3. SysTooL dit :

    J’ai été gêné par cet « entre-deux » de Reitman, en effet! Un cynisme assumé dans la première partie… et une morale bien pensante par la suite…

    SysT

  4. Paul Napoli dit :

    Pour une fois une bonne comédie américaine 7.5/10

    Du même réalisateur j’avais bien aimé Thank you for smoking 8/10

    Si vous voulez developper votre humour rien de tel qu’une comédie italienne, les maitres du genre avec la comédie francaise.
    http://comedieitalienne.com/

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