Décès de l’actrice française Annie Girardot (1931-2011)

Ce lundi 28 février, au lendemain du weekend de la cérémonie des César, rituel qui l’a fait couronner à trois reprises dans sa carrière, l’actrice Annie Girardot est décédée. Elle avait 79 ans.

Depuis 2006 et l’annonce de son mal, Annie Girardot était devenue la plus célèbre des victimes de la maladie d’Alzheimer et, malgré elle, une véritable ambassadrice par les médias. Sa lutte a souvent fait la chronique des journaux et ému nombres de français. Car Annie Girardot aura été une actrice populaire et aura incarné quelques grands rôles qui, s’ils ont marqué la mémoire collective, s’estompaient en revanche de ses propres souvenirs. C’est toute l’injustice d’une maladie atroce mais nous n’épilogueront pas à ce propos.

Arrivée à la comédie par le Conservatoire de la Rue Blanche, Annie Girardot commence sa carrière sur les planches de théâtres au début des années 1950 et a été dirigée par quelques metteurs en scène fameux, de Jean Cocteau à Luchino Visconti. En parallèle, elle obtient quelques rôles secondaires au cinéma, des personnages de maitresse souvent comment dans Le Rouge est mis de Gilles Grangier (57) ou La Corde Raide de Jean-Chares Dudrumet (59).

C’est cependant le personnage de Nadia dans Rocco et ses frères de Luchino Visconti qui lui vaut pour la première fois une véritable reconnaissance. Nadia fait tourner les têtes du clan Parondi, et devient l’enjeu d’une rivalité brutrale entre Rocco (Alain Delon) et son frère Simone (Renato Salavatori). Le personnage de Nadia correspond à une certaine image renvoyée pendant longtemps durant sa carrière par Annie Girardot, celle d’une femme de caractère, décomplexée, forte en tête et séductrice, mais en même temps fragile et qui sera victime des autres.

Dans les années 60, Annie Girardot tourne alternativement entre la France et l’Italie. Elle obtient des rôles dans de nombreux navets souvent comme Le Crime ne paie pas de Gérard Oury (61), mais incarne aussi bien des personnages importants, auprès de Ugo Tognazzi dans Le Mari de la femme à barbe de Marco Ferreri (63) – ce dernier la dirigera également dans Dillinger est mort en 69  ;  ou encore auprès de Catherine Deneuve et Robert Hossein dans Le Vice et la vertu de Roger Vadim (63).

Elle tourne pour la première fois sous la direction de Claude Lelouch dans Vivre pour vivre, aux côtés de Yves Montand (1967) et poursuivra sa collaboration avec le cinéaste dans de nombreux films, La vie, l’amour, la mort en 68, Un homme qui me plait (avec Jean-Paul Belmondo) en 1969, puis jusque dans les années 90.

Les succès des films de Michel Audiard renforce sa notoriété. Au tournant des années 60 et 70, Annie Girardot est parmi les plus populaires des actrices françaises. Le succès des films de Michel Audiard, principalement Elle boit pas, elle fume pas, elle drague pas mais elle cause (70) et Elle cause plus, elle flingue (72) ne fait que donc confirmer sa cote auprès du public. Dans le même temps, son personnage dans Mourir d’aimer de André Cayatte (71), récit d’un amour passionnel entre une professeur et son jeune élève dans la France de Mai 68, fait polémique.

En 1974, Annie Girardot est la mère que part rejoindre la jeune Isabelle Adjani dans La Gifle de Claude Pinoteau, puis elle  joue dans des films plus graves et retrouve d’abord les deux frères de Rocco,  Alain  Delon et Renato Salvatori (qui n’est autre que son mari à la ville), ou dans Le Gitan de José Giovanni. En 1976, elle est bouleversante dans le rôle éponyme de Docteur Françoise Gailland de Jean-Louis Bertucelli. Son interprétation est récompensée par le César de la meilleure actrice en 1977.

A partir des années 80, ses rôles sont moins probants. On la retrouve dans Le Grand Embouteillage de Luigi Comencini (en 79), Philippe de Broca la dirige dans Le Cavaleur et On a volé la cuisse de Jupiter (80), et elle tourne de nouveau sous la direction de Claude Lelouch (Partir, revenir en 85, Il y a des jours et des lunes en 90).
Bertrand Blier lui offre le rôle secondaire  de la mère de Charlotte Gainsbourg et Anouk Grimberg dans Merci la vie (90) et c’est alors à peu près tout. Annie Girardot n’obtient plus de rôles ou presque et tourne essentiellement dans des téléfilms.

C’est Claude Lelouch qui va la relancer en lui confiant le rôle de la mère Thénardier dans l’adaptation par le cinéaste des Misérables de Victor Hugo en 1995. Grace à ce rôle, l’actrice remporte en 1996 le deuxième César de sa carrière, celui du meilleur second-rôle cette fois, et marque la cérémonie par un émouvant discours en déclarant « Je ne sais pas si j’ai manqué au cinéma français, mais à moi, le cinéma français a manqué follement… éperdument… douloureusement. »

Cette consécration aura cependant peu d’effet. Annie Girardot reste rare au cinéma. On la retrouvera par deux fois chez Michael Haneke. Son rôle de mère castratrice dans La Pianiste en 2001 lui permettra de remporter un troisième César, le second dans la catégorie meilleur second rôle, en 2002. Et Haneke lui offre un autre rôle, celui de la maman de Daniel Auteuil dans Caché en 2005.
A l’automne suivant, par la voix de son avocat, le public apprend que Annie Girardot est frappée par la maladie d’Alzheimer. Malgré son handicap, elle continue de tourner dans quelques films discrets et très personnels à leurs auteurs, C’est beau une ville la nuit de Richard Bohringer (2006) et Boxes de Jane Birkin, qui restera comme son dernier film en 2007.

Benoît Thevenin

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Un commentaire sur “Décès de l’actrice française Annie Girardot (1931-2011)”

  1. Canneaise dit :

    C’est avec une très grande tristesse que nous avons apprit le décès de celle qui incarnait pour nous le cinéma féminin français. Elle savait émouvoir, faire rire, faire pleurer et là justement pour son dernier personnage, celui où le destin lui avait fait interpréter le rôle d’une actrice atteinte d’une des plus graves maladies du monde moderne, elle nous avait réellement fait pleurer. Autrefois, lorsque la magie du cinéma n’existait pas, il ne restait que des souvenirs ou au mieux des écrits et des portraits plus ou moins ressemblants des comédiens. Mais depuis l’arrivée du cinéma et plus encore aujourd’hui, la boite de pandore ou l’on enferme les images, permet de faire revivre les acteurs. Aussi, nous ne t’oublierons pas de sitôt

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