Winnipeg mon amour (My Winnipeg) de Guy Maddin (2009)

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Winnipeg mon amour débarque en France deux ans après avoir été conçu. La sortie coïncide avec la rétrospective que le Centre Pompidou en ce moment au cinéaste (du 15 octobre au 7 novembre). L’intégralité de ses nombreux courts et long-métrages (encore aujourd’hui, le cinéaste alterne entre les deux) seront à (re)découvrir, en présence du cinéaste lui-même, accompagné notamment d’Isabella Rossellini avec qui il a souvent travaillé.

Guy Maddin construit depuis plus de vingt ans une oeuvre atypique qui revisite presque littéralement l’histoire du cinéma. Winnipeg mon amour, encore moins que d’autres de ses films, ne fait pas exception. Déjà, le cinéaste convoque Ann Savage, femme fatale du cinéma des années 40, célèbre pour son rôle dans Detour d’Edgard Ulmer en 45, pour jouer le rôle de sa mère. L’actrice avait choisit de mettre un terme à sa carrière dès 1955 et pourtant Maddin l’a convaincu de repasser devant la caméra. Il s’agira d’ailleurs de sa dernière apparition. Ann Savage est décédée le jour de Noël 2008.

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Si le travail de Maddin permet un retour dans l’histoire du septième art c’est parce que son style rappelle incontournablement les origines du cinéma, les films d’Eisenstein ou Murnau. Dans Winnipeg mon amour, Maddin remonte encore plus loin, insérant des séquences animées qui pour certaines fonctionnent selon le principe des lanternes magiques antérieures à l’apparition du cinématographe des frères Lumières. Le voyage dans le temps du cinéma se poursuivra par ailleurs, comme par exemple quand la soeur de Guy Maddin et sa mère s’affrontent dans une scène qui nous ramène immédiatement au cinéma des années 40. Des images vidéos se mêlent aussi qui nous replacent brièvement dans un contexte très actuel…

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Malgré ces allers-retour, l’empreinte principale du film reste celle des avants-gardes des premiers temps du cinéma. Ce style singulier fait la marque de fabrique du cinéaste depuis ses débuts. Maddin raconte l’histoire de sa ville, l’histoire de sa vie, mais selon un mode toujours fantasmé, entre conte onirique et cauchemar, ce qui ne nous permet pas de démêler le vrai du faux.

Le film est peut-être l’un des moins torturé du cinéaste et de cette sorte, parmi les plus accessibles à un public par encore familié de cette univers étrange. Guy Maddin laisse quelque peu sur le côté des obsessions qui peuvent être dérangeantes dans ses autres films. Il n’est pas question ici de masochisme, d’humiliation, de castration psychologique ou d’inceste. De même, le personnage de sa mère récurrent dans ses films est peint ici sous un jour beaucoup moins terrifiant. Guy Maddin lui rend hommage mais de manière quand même ambigüe. Poésie et cauchemar se confondent régulièrement qui confèrent toujours une impression trouble.

Benoît Thevenin


Winnipeg mon amour – Note pour ce film :

Sortie française le 21 octobre 2009

Lire aussi :

  1. Des trous dans la tête (Brand upon the brain !) de Guy Maddin (2007)
  2. The Saddest music in the world de Guy Maddin (2006)
  3. Courts-métrages de Guy Maddin
  4. Amour de Michael Haneke (2012)
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