Heli d’Amat Escalante (2013)

 

Troisième long-métrage d’Amat Escalante, Heli commence par une séquence qui nous ramène immédiatement dans sa séquence d’ouverture à la réalité tragique des gangs mexicains. On sait d’emblée que le film sera plus proche du réalisme sordide de Los Bastardos, son précédent film en 2009, que de Sangre (2005), son premier long-métrage déjà violent mais largement teinté de burlesque.

La violence des gangs est la toile de fond d’une histoire tragique qui a valeur de fable morbide. Heli est un jeune père qui vit avec sa fiancée et son bébé ainsi que son père et sa jeune soeur, dans une modeste maison à l’écart de la ville. Heli travaille comme manutentionnaire dans une usine auto et mène une vie parfaitement honnête et rangée. Estella, sa soeur agée de 12 ans, flirte fièrement avec un garçon de 17 ans qui est lui le souffre-douleur de ses collègues militaires.

 

Los Bastardos nous a quelque peu averti et Heli le confirmera : chez Amat Escalante, la violence peut surgir à n’importe quel moment, brutale et choquante. Amat Escalante accompagne ses personnages avec une précision documentaire, observant le cours normal des choses se déliter progressivement et hors de tout contrôle de la part de son personnage principal.

Le film a valeur de fable cauchemardesque et fonctionne en cela exactement de  la même manière que Los Bastardos, à la différence notable que le cinéaste accompagne cette fois les « gentils » face aux « bâtards » plutôt que le contraire. Difficile dès lors d’échapper à un sentiment de déjà-vu. Le style de la mise en scène, ample et élégante, est le même, les rapports de forces sont identiques, mais là ou la différence est donc notable, c’est du fait qu’en accompagnant la trajectoire de Heli, Escalante parvient plus facilement à déclencher une véritable empathie pour son personnage, et par là aussi, une vraie émotion.

Le cinéaste saupoudre également son action de quelques provocations qui ne seront pas bien vécues par tous les spectateurs. On se sent déjà inconfortable face à la relation qui se tisse entre la petite Estella et son petit ami presque adulte. Ce qui se passe dans le huis-clos d’une chambre de torture, avec tout ce qu’il faut de cruauté et de détails glauques, ne manquera pas non plus de heurter et diviser. Ames sensibles, abstenez vous donc. Pour les autres, surtout ceux qui ont déjà vu Los Bastardos, Escalante va exactement là ou l’on se doutait qu’il irait. Le résultat n’est pas inintéressant, et le talent de metteur en scène d’Escalante est manifeste, mais on se dite aussi qu’ils commencent à être légion les films mexicains qui montrent combien le pays est gangréné par la violence.

 

Lire aussi :

  1. Los Bastardos d’Amat Escalante (2008)
  2. Jeune et jolie de François Ozon (2013)
  3. Gatsby le magnifique (The Great Gatsby) de Baz Luhrmann (2013)
  4. Parque Vía d’Enrique Rivero (2008)
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Un commentaire sur “Heli d’Amat Escalante (2013)”

  1. Vance dit :

    Salut.
    Intéressante critique. J’avais perdu ta trace depuis quelques mois. Si tu veux toujours participer au Palmarès Interblogs, n’hésite pas à m’envoyer les notes sur les films que tu as vus !

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