[REC]³ Génesis de Paco Plaza (2012)

Alors que son compère Jaume Balagueró reprenait sa liberté pour tourner seul Malveillance (sorti en France le 28 décembre 2011), Paco Plaza a lui choisi de livrer un troisième épisode à la lucrative franchise qu’il a imaginé avec le cinéaste de La secte des sans nom. [REC]2 nous avait largement déçu et [REC]3 s’annonçait fatalement comme le film de trop… Et bien pas du tout ; parce que Plaza a manifestement plus d’un tour dans son sac !

Changement de décor et de temporalité : pour [REC]3, Paco Plaza fait table rase des deux premiers films et installe son action dans le cadre d’un mariage traditionnel. L’idée est particulièrement excellente. Elle permet au cinéaste de mettre en place de façon très évidente tout le principe de sa mise en scène en mode found footage. Rappelons qu’à la base, [REC] reprend le principe de Cannibal Holocaust et du Projet Blair Witch d’une mise en scène en immersion, subjective et faussement documentaire. Les images du film sont sensées être les bandes tournées par les protagonistes à l’intérieur du récit. Ici, dans le cadre d’une fête de mariage, Paco Plaza  peut en toute logique légitimer la place de chaque caméra et ainsi justifier chacun des points de vue adopté. Paco Plaza installe tranquillement la mécanique de mise en scène et il n’y a qu’à attendre que surgissent les zombies. Cet oncle à la main bandée parce que mordu par un chien féroce nous parait tout de suite suspect.

Il faut vingt minutes, sur les 85 que durent le film au total, pour que les choses dégénèrent enfin. Et c’est également à ce moment précis que le titre du film vient interrompre subitement le fil de l’action pour apparaitre à l’écran. Les vingt premières minutes constituent alors une longue séquence d’introduction. Le carton-titre est un indicateur de ce qui va se passer immédiatement ensuite. Ce carton ramène [REC] a sa vraie dimension, celles de la fiction. Il rompt ainsi la vaine promesse de réalité que suggère chaque documenteur (ou mockumentary). Le plan suivant confirme cette orientation. L’image est soudainement nette, et le point de vue de la caméra n’est plus justifié. Paco Plaza a simplement envoyé valser le principe fondateur de la réalisation des deux premiers film de la franchise. Quitte à faire du neuf, a reprendre les choses différemment, dans un autre contexte, et sans Balagueró, profitons-en pour revenir à une forme de cinéma classique et affranchie de la mode devenue autant envahissante que pénible des found footage.

Paco Plaza renoue donc avec toute la grammaire cinématographique habituelle. Ce n’est pas tout. Tous les ingrédients du film son différents. Il y a cette fois deux héros clairement définis, le couple de mariés en l’occurrence. Il y a un enjeu dramatique fort. Les époux étant séparés, leur quête consiste à se retrouver. Et puis aussi, Paco Plaza injecte une véritable dose d’humour, faisant de [REC]3, finalement, une oeuvre aux accents véritablement parodiques.

Koldo, le marié, enfile une armure en bon chevalier qu’il est, et le personnage de prendre une allure héroïque. On se trompe là encore. Koldo est envahi par la peur, son courage n’est pas spécialement décuplé, et son armure va se révéler absolument inutile. Cela confère à la quête héroïque de Koldo un côté absurde et drôle. La véritable héroïne sera Clara, l’épouse, bien décidée à ce que ce jour qui est le sien, le demeure. Lorsqu’elle se saisit d’une tronçonneuse pour faire le ménage, la séquence est tout de suite culte.

[REC]3 ne manque pas de surprendre et fait preuve d’une efficacité à toute épreuve. Paco Plaza a été malin dans son choix de s’émanciper du concept originel. Les ressorts de l’horreur  ne sont plus les mêmes et les objectifs ont déviés dans le même temps, faisant de [REC]3 un film en tout point différent des deux autres. Contrairement à [REC]1, le but n’est pas de terrifier les spectateurs. Cette fois, Paco Plaza vise plutôt à la légèreté et de manière quelque peu décomplexée. Le cinéaste prend également un malin plaisir à ruiner les sacro-saintes valeurs familiale. En même temps, il fallait s’y attendre. A chaque mariage, il y a toujours un oncle pour – pardon – foutre le bordel.

Benoît Thevenin

[REC]³ Génesis ***1/2

Sortie française le 4 avril 2012

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