Tomboy de Céline Sciamma (2011)

La sortie au cinéma de Tomboy, second film de Céline Sciamma après Naissance des pieuvres en 2007, devançait de quelques semaines le débat sur la théorie du genre, au sommaire de manuels scolaires de la rentrée 2011. La polémique ainsi née prouve s’il le fallait la délicatesse d’un sujet qui touche les personnes au plus profond de leur intimité.

Laure a dix ans. Elle emménage avec sa famille dans un nouveau quartier et fait bientôt la connaissance de Lisa qui a son âge. Laure se laisser embarquer dans le mensonge et laisse croire qu’elle est un garçon, qu’elle s’appelle Michael. Elle est à un âge où la question sexuelle n’est pas encore dominante, où les corps ne sont pas encore transformés, mais où l’on commence à déterminer son identité.  Les enfants ont tendance à se ranger dans deux camps bien distincts : les garçons, les filles. Il y a ceux qui sont sur le terrain de foot et ceux qui sont en dehors. A travers un geste simple, comme retirer son maillot pour être torse nu comme les autres garçons, Laure s’affirme auprès d’eux, elle est comme eux, le soupçon de sa « trahison » à l’autre camp n’affleure personne. En même temps, Laure semble se mettre en danger, quand l’on sait à quel point les enfants peuvent être cruels.

L’ambiguïté est plus perceptible par les parents qui, sans trop comprendre ce qu’il se passe, voient bien que quelque chose change chez Laure. Les parents s’inquiètent, sans non plus trop mal réagir, mais montrent des résistances. Ils sont conditionnés par des normes sociales qui imposent qu’une fille soit une fille et joue à des jeux de fille  etc.

A travers le portrait simple de Laure, Céline Sciamma interroge le propre regard du spectateur, sans chercher à bousculer ou heurter. Le film, s’il évoque un moment de bascule de la vie de Laure, s’inscrit dans un quotidien banal et ordinaire, ou les obstacles existent et sont affrontés comme autant de passages obligés.

Le monde parait hostile à Laure, mais on ne la sent pas en danger. Ce n’est pas le propos. Il s’agit plutôt pour Laure de déterminer qui elle est, et surtout de sortir de se mensonge qui la protège quelques instants mais qui la condamne à terme à un rejet, une humiliation, qui plus le temps passe, sera lourd à supporter et assumer. Cette chronique de la fin de l’enfance se déroule simplement, subtilement, et avec beaucoup d’intelligence et de sensibilité de la part de Céline Sciamma. Il parait difficile de ne pas s’attacher à Laure, de ne pas être sensible à ce qu’elle vit. Les passerelles sont multiples pour identifier l’enfant que l’on a été par rapport à elle. Il n’y a pas que l’identité sexuelle qui est là en jeu, mais plutôt l’éveil d’une personnalité entière qui commence à se construire et s’émanciper.

B.T

Tomboy ****

Bonus DVD ( disponible à partir du 21 septembre 2011 – Editeur : Pyramide Vidéo) :

– Entretien avec Céline Sciamma (18 min) : la réalisatrice évoque les différentes étape de la fabrication du film. Un complément intéressant pour approfondir la compréhension de son travail.

– Sous-titres français pur sourds et malentendants.

Crédits :

© 2011 – Hold-Up Films & Productions / Lilies Films / Arte France Cinéma


Rendez-vous sur Cinetrafic, retrouvez les films de cette année sur la catégorie Film 2011 ou trouvez un bon film à voir !

Lire aussi :

  1. Naissance des pieuvres de Céline Sciamma (2007)
  2. Blank City de Céline Danhier (2010)
  3. Un monde sans femmes de Guillaume Brac (2011)
  4. Louise Wimmer de Cyril Mennegun (2011)
Email

Laisser une réponse