True Grit de Joel et Ethan Coen (2011)

Berlin 2011 / Film d’ouverture

Le cinéma, c’est comme la musique, préférez toujours l’original à la copie ! Toujours ? Non ! A chaque règle son exception. En l’occurrence, l’adaptation au cinéma du roman True Grit de Charles Portis par les frères Coen est bien plus satisfaisante que celle d’Henry Hathaway avec John Wayne réalisée en 1969.

Le cran, le courage, salués par le titre, c’est d’abord celui de Mattie Ross, une jeune femme au caractère bien trempé qui n’a qu’une idée en tête, venger la mort de son père liquidé par un bandit des grands chemins.

Les frères Coen n’avaient jamais abordés frontalement le genre du western, même s’ils l’avaient déjà quelques peu explorés par des films empruntant des codes proches, de Blood Simple à No Country for old men en passant par Fargo. Avec True Grit, ils ne réinventent pas, ni ne dépoussièrent, un genre quasi épuisé jusqu’à la moelle. Le film est même en apparence classique, dans son script peut-être, dans sa forme déjà moins.

Le récit est simple, basique même, et ne propose guère de situations renversantes. L’intérêt est ailleurs, dans la mise en scène ample et mouvante qui explore avec une élégance extrême (remarquable photo de Roger Deakins encore) les paysages ouverts aux quatre vents des plaines américaines. L’intérêt est là mais pas seulement là. Il est surtout dans les personnages, à commencer par celui de Mattie Ross (Hailee Steinfeld), remarquable révélation du film, seul personnage féminin d’importance, mais qui en impose incroyablement face à un Jeff Bridges lui même au sommet de son art. Matt Damon et Josh Brolin n’étant pas de simples faire-valoir, c’est dire si les performances sont notables. C’est un mano a mano permanent qui livre la jeune et déterminée Mattie face à ce vieux bougre de Rooster (Jeff Bridges), marshal fatigué qui va puiser sa motivation autant dans la bourse que lui tend Mattie que dans la provocation qu’elle lui impose quant à son égo. Le duo, par son caractère sec, intransigeant, et par leurs tirades si galvanisantes, semble comme issu de cet excellente série qu’est Deadwood. La série a peut-être amorcé le retour, certes éparpillé, des westerns importants dans les salles depuis quelques années (de Open Range à Jesse James en passant par Appaloosa ou le remake de 3h10 to Yuma).

True Grit est peut-être moins impressionnant qu’un No Country for old men, mais n’en demeure pas moins parsemé de morceaux de bravoure qui élèvent le film bien au-delà de la moyenne. La séquence de la cabane en est un, par exemple, ou la tension est forte, aidée par un montage au couteau. Il ne dépasse apparemment rien de ce True Grit. Les frères Coen affichent une maîtrise constante, ce qui ne surprend pas de leur part, mais quand même… car ce n’est jamais évident et les Coen eux-mêmes ont pu le démontrer par le passé à travers quelques films quelque peu bancals. Et puis au-delà de cette vraie révélation qu’est ici Hailee Steinfeld, il fait diablement plaisir de voir un Jeff Bridges aussi robuste – à tout point de vue – lequel double donc la mise après son rôle dans Crazy Heart l’année dernière.

Benoît Thevenin


True Grit – Note pour ce film : ****1/2

Sortie française le 23 février 2011


Lire aussi :

  1. A Serious Man de Joel et Ethan Coen (2009)
  2. Intolérable cruauté (Intolerable Cruelty) de Joel et Ethan Coen
  3. True Lies : Le Caméléon (True Lies) de James Cameron (1994)
  4. True Noon de Nosir Saidov (2009)
Email

3 commentaires sur “True Grit de Joel et Ethan Coen (2011)”

  1. vincent dit :

    Très bien ! Je file au cinéma voir ce dernier Coen !

    Bravo pour le blog !

  2. frmwa dit :

    Très bon western effectivement, respectueux de la forme classique. Pas de énième degré ou de parodie. Mais des dialogues typiques des frères, qui font très bien l’affaire. Une belle réussite.

  3. selenie dit :

    Etant fan de western et de John Wayne j’étais très interessé par ce nouveau film des frères Coen… L’ouest, le vrai semble un peu trop aseptisé, la ville est propre, les pommes sont plus rouges et étincelante qu’une OGM, la fillette traverse une rivière et ressort sèche !… Pas de grosses erreurs mais plein de petits détails qui gâchent un peu l’écrin si bien servit par les frangins Coen. Jeff Bridges est très bon mais il n’égale pas le charisme de John Wayne. La BO superbes et la beauté formelles des scènes font de ce western un film efficace mais qui n’atteint pas les sommets qu’on nous a promis. Dommage… 2/4

Laisser une réponse