La Nymphe (Nang Mai) de Pen-ek Ratanaruang (2009)

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Le réalisateur de « Moonrak Transitor » et de « Ploy » nous revient avec un très mystérieux trio amoureux…

Le nouveau film de Pen-ek Ratanaruang est au croisement entre son précédent film Ploy, et Tropical Malady de son compatriote Apichatpong Weerasethakul. Les deux cinéastes thaïlandais savent filmer la jungle et, dans le cas de La Nymphe, la seule scène d’ouverture est d’une beauté stupéfiante. La caméra flotte entre les arbres, mais ces premières paisibles secondes sont soudainement altérées. Une jeune femme apparaît dans le champs de la caméra. Elle fuit deux hommes lesquels la violeront dans une vision qui ne sera que furtive pour le spectateur. Les deux violeurs sont ensuite retrouvés gisant dans une rivière. La scène ne sera jamais expliquée. Le film se poursuit dans le décor aseptisé d’un appartement. C’est à partir de là que le thème fétiche de Pen-ek Ratanaruang commence d’être déroulé. Le couple affronte son plus fort ennemi, la monotonie. L’homme est un photographe qui propose à sa femme de l’accompagner pour son reportage en pleine jungle. Cette expédition aura des répercussions inattendues sur la vie du couple…

Dans Ploy, Pen-ek Ratanaruang instruisait une sorte de réflexion sur le couple particulièrement fumeuse. La Nymphe est un film plus difficile à appréhender, au charme diffus. Toute la réflexion sur le couple se dilue là dans le rapport qu’entretiennent les personnages à la jungle. Il y a quelque chose de l’ordre du mystique qui confère à cette jungle un pouvoir inédit.

Le film recèle de belles idées, de métaphore superbes qui renvoient à l’idée d’une fusion avec la nature, ce qu’elle prend avant de donner. La Nymphe est un film étrange, qui ressemble en bien des aspects même si le ton est radicalement différent à Tropical Malady. Manifestement, le film de Weerasethakul a nourrit le travail de Ratanaruang, à moins que les deux films, très simplement, se réfèrent aux mêmes croyances locales.

Le film de Ratanaruang est quasi mutique. Cela ajoute à la monotonie d’un film qui se déroule de manière très lancinante, limite imperceptible. On se souvient des dialogues parfaitement niais et risibles de Ploy. Les rares échanges de La Nymphe confirment le peu d’aptitude qu’a le cinéaste avec les dialogues. De même que ce métrage confirme aussi bien son formidable talent de filmeur. Pen-ek Ratanaruang a cependant encore du mal à faire coïncider ses belles idées esthétiques avec des idées narratives et/ou intellectuelles. Il y a un côté poseur qui est parfois gênant. Il faut dire que La Nymphe est un film au rythme très lent et sur lequel les prises sont rares.

En poursuivant de manière métaphorique sa réflexion sur l’amour, sur la fidélité, Pen-ek Ratanaruang confère à son cinéma une nouvelle dimension. Il lui faudra cependant encore d’autres films pour arriver vraiment à maturité, nous convaincre encore plus.

Benoît Thevenin


La Nymphe – Note pour ce film :


Lire aussi :

  1. Headshot (Fon Tok Kuen Fah) de Pen-ek Ratanaruang (2011)
  2. Ploy de Pen-ek Ratanaruang (2007)
  3. The Limits of control de Jim Jarmusch (2009)
  4. Les Murmures du vent (Sirta la gal ba) de Shahram Alidi (2009)
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Aucun commentaire sur “La Nymphe (Nang Mai) de Pen-ek Ratanaruang (2009)”

  1. Bamboo dit :

    J’ai lu avec attention ta critique et j’en prends bonne note ;-). Il est déjà tellement rare que l’on porte attention aux films thaïs…

  2. frmwa dit :

    Mais non, il n’est pas poseur du tout…
    Il faut voir Monrak transistor aussi, l’un de ses premiers films.
    L’esthétique c’est intellectuel de toute façon.

  3. Florine dit :

    Il faut quand même avoir vu « Last Life in the Universe », un film absolument superbe à tous points de vue, pour vraiment se faire une idée du travail de ce réalisateur.

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