Grande révélation de l’Etrange festival à l’automne dernier avec Kill List, puis lauréat à Beaune du Prix de la critique pour le même film (lequel sort en salle le 11 juillet), Ben Wheatley remet le couvert avec Touristes, un troisième film – il a aussi réalisé Down Terrace en 2009 – tout aussi fou et réjouissant que le précédent, présenté cette fois en séance spéciale de la Quinzaine des réalisateurs 2012.
Les trois films de Ben Wheatley se rejoignent sur une chose : chacun est un authentique jeu de massacre. Humour très noir et caustique, scènes gores à faire grincer des dents, et style réaliste assez proche du documentaire, font que déjà, on reconnait à Ben Wheatley une patte très singulière .
Ceux qui verront Kill List à sortie salle dans quelques semaines risque d’être déroutés. Kill List est un film imprévisible, à la lisière de plusieurs genres et qui bouleverse tous les repères habituels des spectateurs (on vous en parle ici). Touristes s’inscrit dans un registre beaucoup plus simple et linéaire. Ben Wheatley nous embarque pour un road movie et n’opte cette pour aucune changement radical de direction. Le film est dès lors beaucoup plus simple à appréhender.
Les personnages de son film sont tous complètement tarés. Tina vit auprès de sa mère ultra possessive. Elle n’a jamais eu d’amoureux et ne vit que dans le culte de son chien Poppy. Un jour c’est le drame, elle tue accidentellement poppy. Tinat trouve cependant en Chris un homme qui semblent l’aimer. Contre l’avis de sa mère, elle embarque avec lui pour un road trip en caravane à travers l’Angleterre.
Tina, malgré son âge (au moins la trentaine), se comporte comme une adolescente effarouchée. Chris, par son sourire crispant et ses regards, dissimule assez mal son caractère psychopathe. A travers eux, Ben Wheathley règle ses comptes avec les honnêtes gens d’une manière générale. Chris est un être mesquin qui nourrit son ressentiment par une jalousie constante et une patience très limitée. Il révèle assez rapidement une propension à éliminer les gens qui le gêne tout en faisant croire à des accidents, et entraine Tina, qui n’est pas moins folle que lui, dans son parcours meurtrier.
Le film est violent, mais surtout constamment drôle. C’est tout un univers de gens modestes, polis, minables, sans personnalité et de mauvais goût que le cinéaste dégomme avec rage et un humour acide. Wheatley se plait à détruire toutes les structures collectives. Groupes d’amis, couples, familles, personnes n’est épargné. Le cinéaste tourne en ridicule toutes les petites manières bien pensantes, les activités ringardes, les bobos faussaires… et décrit finalement un monde hypocrite ou l’égoïsme le plus farouche prime toujours. Cinglant – sinon cinglé – décomplexé, amoral, Touristes est aussi d’un bout à l’autre absolument réjouissant et une puissante catharsis.
Benoît Thevenin
Touristes !
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