Mr. Turner de Mike Leigh (2014)

Le titre trahit immédiatement l’intention de Mike Leigh en réalisant ce portrait du peintre britannique William Turner. Avec ce film, le cinéaste raconte la vie simple et ordinaire du Maitre. Il ne s’intéresse en revanche pas au processus créatif, au geste du peintre. Cette intention se retrouve dans la mise en scène. Mike Leigh ne filme presque pas Turner en train de peindre. Il interrompt le plus souvent la séquence au moment ou l’artiste esquisse son premier geste.

 

Le rythme lent du métrage, sa durée assez longue aussi (2h30) alors que les enjeux narratifs sont simples et rares, épouse également cette idée d’accompagner Turner dans son quotidien le plus trivial. Mike Leigh fait ainsi le portrait d’un Turner solitaire et ronchon, un homme quasi animal par sa façon de grogner et de s’agripper à sa servante, mais aussi un génie véritable et reconnu comme tel par ses pairs.

Turner est issu d’un milieu bourgeois et vit confortablement avec son père. Par rapport a nombre de ces confrères, il ne souffre pas du manque d’argent. Son caractère dur, replié sur lui même, dissimule en partie une attitude généreuse quand on le sollicite pour prêter son argent. C’est là ou le film est le plus intéressant, dans les rapports de classe qui se jouent autour de Turner, quand il est au milieu d’autres peintres, quand il se lie à la tenancière d’une maison d’hôte, quand il fait face à la critique ou à l’expertise pédante et hypocrite de collectionneurs.

 

Mike Leigh réussi a rendre attachant et émouvant un homme qui ne se laisse pas facilement aimer. C’est un bel hommage qu’il lui rend ainsi, mais cet hommage ne pourrait pas être réussi si la forme du film ne faisait pas naturellement écho à l’art de Turner. En l’occurrence, dès le premier plan on est saisit par la qualité de la photo. C’est bien la moindre des choses pour la mise en image de la vie d’un artiste réputé pour être « LE peintre de la lumière », mais cela ne doit pas empêcher  de reconnaitre le formidable travail pictural du chef opérateur Dick Pope. Cela donne néanmoins un film d’aspect très classique et sans grandes aspérités. Le portrait est beau, émouvant, porté par un Timothy Spall impressionnant, mais il ne va pas non plus plus loin que le bout du pinceau.

Lire aussi :

  1. Another Year de Mike Leigh (2010)
  2. Sleeping Beauty de Julia Leigh (2011)
  3. Les Merveilles (Le Meraviglie) d’Alice Rohrwacher (2014)
  4. Red Amnesia de Wang Xiaoshuai (2014)
Email

Laisser une réponse