Le Gamin au vélo de Luc et Jean-Pierre Dardenne (2011)

Le schéma des films des frères Dardenne est souvent le même : une personne jeune (enfant ou jeune adulte) socialement en difficulté mais qui lutte contre la fatalité. On a ainsi l’impression de toujours avoir affaire au même film, mais ce n’est évidemment pas tout à fait ça.

Les deux frères se sont déjà distingués à la fois pour leur style caméra à l’épaule qui à fait école et pour leur science de la narration.
Le Gamin au vélo est un film très écrit et très bien écrit. L’histoire est cependant moins forte et le récit se révèle un peu trop balisé et donc attendu. L’histoire faisant l’essentiel de l’intérêt et de la qualité des films des Dardennne, le niveau est cette fois moindre. Le personnage de Cyril, un sale gosse de 12 ans, est moins attachant que beaucoup des personnages des Dardenne. Cyril est ingérable pour ses proches, et un peu irritant pour le specatateur. Il est du genre à avoir une idée fixe dont il ne démordra jamais, en témoigne le début du film ou, peu lui importe qu’on lui dise que son père a déménagé sans laisser de nouvelle adresse, il ne dérive pas de son objectif de le retrouver.

Le procès est souvent fait aux Dardennes de livrer des films misérabilistes. Le Gamin au vélo ne l’est pas plus que leurs autres films, mais il peut être une cible plus facile quant à ce propos. Par exemple dans une scène, Cyril suit un « ami » dans son appart. Ce dernier trouve sa grand-mère effondrée par terre, on apprend que le grand-père est un alcoolique qui passe sont temps au bar. Le tableau n’est pas joyeux et même pour le moins stéréotypé. Le problème tient au fait que cette séquence est assez symptomatique du film dans son ensemble. Les frères prennent en plus soin de rester consensuels, de ne jamais sacrifier leurs personnages et là, ça donne en fait plutôt une impression de manque de courage.

Pour autant, le film marque quelque peu une évolution dans le cinéma des frères Dardenne. Il ne se repose pas cette fois sur une mise en scène caméra à l’épaule. La forme est là plus classique et posée, mais en même temps réfléchie. Les deux frères ont clairement l’ambition d’une mise en scène différente, même si par ailleurs ils respectent leurs codes précédemment établis, une idée de cinéma social qui leur est assez propre… On reconnait rapidement un film des Frères Dardenne,  même sans prendre connaissance de ce dont leurs films parlent, il y a une unité de ton et de thématiques, un schéma narratif qui est globalement toujours le même, quitte à ne plus vraiment surprendre.

L’autre évolution notable tient au fait que un des personnages principaux est interprété par Cécile de France. C’est la première fois que les deux cinéastes dirigent une actrice qui a une véritable notoriété, dès lors que l’on ne compte pas Jérémie Rénier et Olivier Gourmet, deux comédiens qu’ils ont eux même révélés. On peut y voir une ouverture, comme si les frères Dardenne allaient commencer de chercher à faire une autre cinéma que ce qu’ils ont fait jusqu’à présent. On en est loin sans doute, mais cette une possibilité. Ce ne serait peut-être pas une mauvaise idée car avec Le Gamin au vélo, ils donnent là l’impression de tourner en rond.

Benoît Thevenin

Le Gamin au vélo ***

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  1. La fille inconnue de Luc et Jean-Pierre Dardenne (2016)
  2. Le Silence de Lorna de Jean-Pierre et Luc Dardenne (2008)
  3. Le Fabuleux destin d’Amélie Poulain de Jean-Pierre Jeunet
  4. La Cité de l’indicible peur (aka La Grande Frousse) de Jean-Pierre Mocky
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Un commentaire sur “Le Gamin au vélo de Luc et Jean-Pierre Dardenne (2011)”

  1. foxart dit :

    Je ne trouve pas que le schéma narratif soit toujours le même ici, d’une part parce que le suspense qui prévalait dans ses précédents films est ici vite désamorcé par le rejet du père et aussi et surtout parce que ce gamin qui court ne se frappe plus dans des murs, comme Rosetta ou Lorna, qui chaque fois qu’elle s’élancent se cognent dans un nouveau mur. Ici, c’est presque l’inverse, ici, le gamin court toujours et se tape dans les murs, forcément parce qu’il est aveuglé par la douleur, mais quil ne voit simplement pas qu’en la « personne lumière » du film joliment et subtilement incarnée par C. De france il à l’opportunité de ne plus se cogner dans les murs et d’y trouver une porte déjà grande ouverte. C’est un film pas seulement ensoleillé, mais rempli d’émotion et d’espoir… Personnellement il m’a émerveillé et serré le cœur !

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